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vendredi 22 décembre 2017

Des jeunes haïtiens qui ont marre de leur pays passent aux aveux

Je suis indigné de constater comment l'existence de l'Homme haïtien est réduite à sa moindre importance et du même coup transformée en quelque chose d'encombrant.


Pour tenter de s'affranchir de la misère qui rend sa vie si peu reluisante, l'Haïtien doit faire preuve d'imagination. Particulièrement les jeunes. Car, ils n'ont, pour la grande majorité, ni emploi, ni épargne, ni assurance, ni assistance sociale.

Sur ce, je vous rapporte une scène dont j'ai assistée et qui me hante depuis lors. Je pense que la meilleure façon de me libérer de son emprise, c'est de la raconter aux lecteurs, dans l'espoir d'avoir une réaction proportionnelle au danger qui guette l'avenir de la République d'Haïti.

Il y a quelques semaines, je venais de participer à une émission hebdomadaire de radio animée par un panel de journalistes à Ouanaminthe. De retour à la maison, je me suis arrêté au cours de route pour renflouer le compte de mon téléphone. Là, j'ai assisté à une conversation entre 5 et 6 jeunes garçons qui se plaignent de leur misère et vantent, du même coup, des solutions qu'on pourrait qualifier de désespérées.

L’un d’eux lance « Moi, je ne vais pas voler. Mais, je ne critique pas quelqu’un qui vole. Parce que, dans ce pays, face à cette misère, si quelqu’un ne se met pas à voler les affaires d’autrui c’est parce qu’il a un bon moral ».

Puis, un autre s’enchaîne « Si on poursuit un voleur, et je me trouve sur le chemin de ce dernier, je tournerai mon regard ailleurs afin de lui laisser prendre la fuite ».

Dans ce climat de franchise et de cynisme, ces jeunes se bousculent pour passer aux aveux. Pendant qu’un troisième tente d’émettre son opinion sur le premier sujet, un quatrième lui ôte la parole pour aborder un autre sujet qu’on pourrait titrer « Fuir Haïti à tout prix! ».

Là, vous supposeriez qu’il s’agit de se rendre au Brésil ou au Chili, comme c’est très courant ces dernières années. Pour s’y rendre, il faut avoir plusieurs milliers dollars américains. Ces voyages coûtent beaucoup trop d’argent pou ces jeunes. 

Le jeune garçon s’imagine aux Etats-Unis d’Amérique, la première puissance mondiale.

Oui, aux Etats-Unis d’Amérique. Pas sur les plages de Miami. Mais, dans une prison de préférence!

Aussi bizarre que puisse être cette idée, ce jeune trouve de quoi «se justifier». Le pire, c’est que ses camarades sont de même avis que lui.

« Quand vous êtes en prison aux Etats-Unis, on vous donne à manger plusieurs fois par jour et vous avez accès à un téléviseur et des salles de sport », raconte-t-il, tout en soulignant « En Haïti, même étant libre on ne peut pas se nourrir ».

A entendre ses jeunes, il est raisonnable de dire qu’«Haïti est foutue». Toutefois, il y a de l'espoir, dans la mesure où les classes dirigeantes du pays se rendent compte de la précarité dans laquelle vivent les habitants, de la fragilité du pays et agissent afin de mettre Haïti sur les rails du développement ou les jeunes qui subissent de plein fouet les effets de cette situation de misère dont connaît le pays, s'engagent et agissent afin de changer les donnes.


Jéthro-Claudel Pierre Jeanty

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