Un motocycliste faisant le plein dans une station d'essence à Ouanaminthe, le 13 mai 2017 | par Jéthro-Claudel Pierre Jeanty / de Nord-Est Info |
Depuis plus
d'une semaine, en Haïti, l'actualité est dominée par l'annonce du gouvernement sur
l’augmentation du prix de l'essence à la pompe. Les produits pétroliers étant
subventionnés à la pompe, l'Etat ne serait plus en mesure de supporter cette
charge. Une mesure que les hauts fonctionnaires du gouvernement, dont le
premier ministre Jack Guy Lafontant, tentent d'expliquer le bien fondé, en
avançant:
1- Haïti
perd plus de 7 milliards de gourdes chaque année en subventionnant les produits
pétroliers.
2- La
subvention des produits pétroliers sur le marché haïtien profite beaucoup plus
à ceux qui ont les moyens économiques pour payer normalement qu’aux masses
populaires, contrairement à ce qu’on a souvent laissé entendre.
3- Le prix,
tel qu’il est, crée une grande inefficacité et le différentiel est très
important par rapport à nos voisins dominicains. Haïti subventionne à 30% le
consommateur qui est de l’autre côté de la frontière. Il faut mettre les prix
les plus proches possibles pour éviter ce fait.
4- selon la
loi, à chaque hausse ou baisse de 5% du prix de l'essence sur le marché
international le prix doit être ajusté sur le marché local. Et, la hausse
atteigne déjà la barre de 5%.
Les
autorités font écho de ces arguments, sans souligner qu'Haïti achète les
hydrocarbures dans le cadre de Petrocaribe à meilleur prix que celui du marché
international.
Pour comprendre ce qui se passe, il faut surtout s'intéresser à la vue d'ensemble, pas aux détails!
Pour comprendre ce qui se passe, il faut surtout s'intéresser à la vue d'ensemble, pas aux détails!
Dans la
foulée, les avis se défilent. Et, chacun
s'abonde en fonction de sa compréhension et de ses intérêts.
Pour
l'expert en économie, Kesner Pharel du Groupe Croissance c'est une nécessité,
considérant les faibles recettes collectées par l'Etat. Pour certains
politiciens opposants au gouvernement, c'est un scandale. L'ancien sénateur
Moïse Jean-Charles entend entreprendre des actions en vue de combattre la
décision. De leur côté, des syndicalistes du transport en commun, des membres
de la population se montrent déterminer pour faire échec à cette éventuelle
mesure. Selon ces derniers une telle augmentation ne ferait qu'enfoncer la
population dans la misère.
Actuellement,
le gallon de la gazoline coûte 189 gourdes, celui du diesel est 149 gourdes et
le kérosène est de 148 gourdes.
Dans un
premier temps le gouvernement a prévu une augmentation de 116 gourdes sur la
gazoline (pour le faire passer à 305 gourdes), 88 gourdes sur le diesel (pour
le faire passer à 237 gourdes) et 84 gourdes sur le kérosène (pour le faire
passe à 232 gourdes), avant de revoir sa proposition légèrement à la baisse en
proposant, 90 gourdes pour l'essence (gazoline), 80 gourdes pour le diesel
(gasoil) et 75 gourdes pour le kérosène, suite aux discussions tenues mardi 09
mai 2017.
De leur
côté, les associations syndicales, ont proposé une augmentation de 20 gourdes
sur la gazoline, 15 gourdes sur le diesel et 15 gourdes sur le kérosène, selon
ce qu’a fait savoir le syndicaliste Duclos Bénissoit. Une proposition que les
représentants du gouvernement ont rejetée d'un revers de main.
Les
Ministères de l’Economie et des Finance, du Commerce et de l’Industrie
tranchent avec un avis en date du 14 mai, en informant qu’à partir
15 mai 2017, les prix en vigueur sur territoire national sont de 224 gourdes
pour la gazoline, soit une augmentation de 35 gourdes, 179 gourdes pour le
gasoil, soit une augmentation de 30 gourdes et 173 gourdes pour le kérosène,
soit une augmentation de 25 gourdes.
Toutefois,
ils seraient peu, ceux qui comprennent que le gouvernement a gagné la bataille.
Oui, le
gouvernement a gagné !
Il ne faut
pas s’attarder sur les différences entre 116 et 35 gourdes, 88 et 30 gourdes, et
84 et 25 gourdes.
Le plus
important, dans tout ça, c'est qu’une bonne partie de la population et les plus
redoutés (les syndicalistes) ont accepté
le principe de la hausse du prix et ces derniers étaient présents dans les
négociations.
Dès la
première proposition des syndicats, les stratèges du gouvernement
Moïse-Lafontant devraient dire entre eux, à voix basse, bien entendu, « Nous
sommes près du but ». Car, il serait absurde que les autorités auraient
espéré que cette population qui patauge dans la misère la plus abjecte
accepterait de payer 90 gourdes en plus sur chaque gallon de gazoline, voire
116 gourdes.
Oui, le
gouvernement a remporté une grande victoire. Car, si la proposition des
syndicats venait du gouvernement, elle connaîtrait le même rejet que connaît
celle avec 116 gourdes.
Considérant
la précarité dans laquelle vit la population et la hausse des prix des produits
de première nécessité sur le marché qui fera suite à celle de l'essence, sans
l'annonce de programmes sociaux et de grands projets de développement, le
président Jovenel Moïse, le premier ministre Jack Guy Lafontant, les ministres
concernés et leurs conseillers donneraient crédit à ceux qui pensent que ce
gouvernement est un gouvernement anti-peuple.
Conscient de
ces enjeux, le gouvernement a d'abord fait une large publicité sur l'état
lamentable de la finance du pays et le projet d'infrastructure agricole
Caravane Changement. Et, cette campagne a bien aidé à contrôler les nerfs tout
en sapant le projet des opposants souhaitant saisir l’occasion pour déclencher
une série de mouvements contre le gouvernement, en dépit que cette hausse
dépasse celle du dernier gouvernement.
Le dernier
gouvernement a dû reculer face aux pressions populaires suite à une
augmentation de l’ordre de 30 gourdes sur la gazoline, 30 gourdes sur le diesel
et 25 gourdes sur le kérosène, en août 2016.
Les
syndicats avaient refusé des hausses supérieures à 16 gourdes sur la gazoline
et le diesel et 12 gourdes sur le kérosène.
Le Sénat, de
son côté, au moyen d'une résolution, a enjoint au gouvernement du président
Jocelerme Privert et du premier ministre Enex Jean-Charles de revenir
instantanément sur sa décision. Moins d'une semaine après l'augmentation des
prix en date du 21 août 2016, le gouvernement a fait le retrait de la décision « Dans
la crainte d'explosion sociale », laissaient entendre les autorités.
Jéthro-Claudel
Pierre Jeanty
Aucun commentaire:
Publier un commentaire